Une discrimination si "ordinaire" ?

Publié le par Eligi Formation

Voici une histoire en provenance d'Agen sur une discrimination dite ordinaire, du moins, tel que ça a été rapporté par le (la) journaliste de la Dépêche. Ordinaire parce que la situation du protagoniste n'est pas comme toutes celles qui sont médiatisées, mais sur un critère dont on parle peu : l'état de santé. A la première lecture, je me suis dit "Eh oui encore une personne victime de ce fléau. Tant mieux que l'on parle des problèmes de santé comme critère de discrimination dans la presse. C'est si rare."


Voici l'article :

"C'est un cas de discrimination ordinaire, comme il s'en produit communément, situations la plupart du temps tues par les victimes. Ce qui est moins courant, c'est le motif de ce traitement du fait d'une différence.

Cet Agenais, que nous appellerons Julien pour préserver son anonymat, n'est ni Noir, ni Maghrébin. Son orientation sexuelle est dans la « norme ». Il n'est pas obèse, pas davantage handicapé physique. Tout comme il faut, juste différent comme tout le monde.

Mais Julien est soumis à une obligation de soins, ordonnée par la justice suite à un délit routier lié à l'alcoolémie. Pas un alcoolique d'habitude, plutôt un type qui a dérapé, jusqu'à se retrouver dans cette situation. De ce fait, et pour un temps, il se rend régulièrement dans un centre de soins agenais où il en profite pour exposer ses difficultés. Le jeune homme cherche un logement. La structure de soins met un téléphone à sa disposition, qu'il utilise pour répondre aux annonces de location.

C'est ainsi qu'une propriétaire contactée rappelle à ce numéro, pensant joindre le demandeur, qui lui avait signifié son intérêt pour le logement proposé. Mais c'est la secrétaire du centre de soins qui décroche : « Centre d'addictologie, bonjour… ». Et la dame de percuter aussitôt : « Ah, je comprends, ce monsieur est alcoolique ! Désolée, je ne peux pas louer à des gens comme ça… » L'employée de la structure tente de s'expliquer avec l'interlocutrice, sans succès. « N'insistez pas. J'ai été infirmière, les alcooliques, je sais ce que c'est (sic) ».

Ni Noir, ni Maghrébin, ni homosexuel, ni obèse, pas handicapé pour un sou, juste obligé de soins, Julien n'aura quand même pas son appart. Elle n'est pas moche, la vie ?"


Et puis, je me suis posé la question suivante : En quoi la situation de cette personne est-elle ordinaire ? Est-ce ordinaire par rapport aux milliers de personnes qui, au quotidien, subissent la discrimination ? Ou bien est-ce ordinaire parce que ce n'est pas un noir, une femme, un handicapé, un homosexuel, qui on le sait, sont les premières victimes de la discrimination.

 

Ne devrait-on pas parler d'une situation extraordinaire, dans la mesure où nous vivons dans une société qui revendique le droit à l'égalité ? Ceci est la preuve de la difficulté, encore aujourd'hui, de dénoncer une pratique qui va à l'encontre de notre pacte républicain.

 

Je trouve cet article d'autant plus intéressant que, ce matin, sur France-Info, la chronique du médiateur de Radio France était sur le thème des mots employés par les journalistes. Notamment étaient dénoncé une mauvaise utilisation des termes foulard et voile, qui concernent deux modes vestimentaires différents mais dont l'usage, par les journalistes, n'est pas toujours fait à bon escient.

L'autre terme était : bande de jeunes. Ce terme est souvent utilisés pour qualifier des pratiques délinquantes. Et ce qui est dénoncé par les auditeurs est la stigmatisation d'une catégorie de population alors que tous les jeunes n'ont pas tous des pratiques délinquantes. Il était donc demandé aux journalistes de veiller à préciser la catégorie dont ils parlent tel que jeunes voyous. Et là, je ne suis pas tout à fait d'accord. Le simple fait de parler de jeunes, même en y adjoignant un autre terme, conserve un côté très stigmatisant pour cette tranche de population. Ayant été jeune, à une époque, cela m'a toujours dérangé de me retrouver amalgamer dans les médias en raison de mon âge. Ne pourrait-on pas parler simplement de voyous ou de délinquants,  qui me semble être le terme le plus adéquant lorsqu'une infraction à la loi est commise. On parle bien de délinquant de la route, mais on ne parle jamais de vieux délinquant ?


Même si je salue l'initiative du médiateur qui, dans cette situation, joue pleinement son rôle, ce sujet montre également le chemin qui reste à parcourir pour faire évoluer les préjugés et les stéréotypes dans les médias.


Publié dans Médias

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