Le Handicap s'impose dans le monde du travail
Trois entreprises sur quatre emploient au moins un handicapé contre deux sur trois il y a six mois, selon le 3e baromètre emploi et handicap du «Figaro économie» et MissionHandicap.com.
«En progrès, mais peut encore mieux faire.» Cette appréciation, classique sur les livrets scolaires, correspond parfaitement au comportement des entreprises vis-à-vis des travailleurs handicapés.
Selon le 3e baromètre «emploi et handicap» (il est bisannuel) réalisé par OpinionWay pour Le Figaro économie et MissionHandicap.com, 74 % des sociétés de 20 salariés et plus ont des personnes handicapées dans leurs effectifs, contre 66 % lors de la précédente enquête. Cette progression de huit points en six mois mérite d'être saluée, surtout en période de crise.
Sans surprise, la situation varie sensiblement selon la taille des sociétés. Parmi les entreprises de moins de 50 salariés, des progrès importants ont été réalisés. Le pourcentage de celles n'employant aucun travailleur handicapé est passé de 44 % à 33 %, soit un recul de 11 points. Quant à celles de plus de 250 salariés, elles ont toutes, désormais, au moins un salarié handicapé dans leur effectif. Par secteur d'activité, les services viennent, de peu, en tête (76 %), devant l'industrie-BTP (75 %) et le commerce (71 %).
«L'entrée en vigueur, le 1er janvier dernier, d'un décret de la loi de 2005 infligeant une amende plus lourde aux mauvais élèves, autrement dit la “peur du gendarme”, a incité bien des entreprises à faire un effort», commente Charlotte Le Gaillard, directrice d'études chez OpinionWay.
Ce décret prévoit que les firmes n'ayant mené aucune action (contrat d'intérim, CDD, CDI, accueil de stagiaires, recours au secteur protégé…) les trois années précédentes devront payer à l'Agefiph (1) une pénalité annuelle égale à 1 500 fois le smic horaire (environ 13 300 euros), contre 400 à 600 fois auparavant, multipliée par le nombre de personnes handicapées manquantes dans leurs effectifs, le quota fixé par la loi étant de 6 % (2).
Autre enseignement de cette étude : neuf entreprises sur dix connaissent «très bien» ou «assez bien» la loi handicap ainsi que le décret entré en vigueur le 1er janvier 2010.
«Les campagnes d'information et de sensibilisation que nous avons menées depuis le vote de la loi en 2005 et qui se sont intensifiées (spots TV, visuels dans la presse…) à l'approche de la date fatidique ont porté leurs fruits, se félicite Jean-Marie Faure, président de l'Agefiph. Cette année, nous allons maintenir l'effort sur la formation des personnes handicapées à la recherche d'un emploi, car une demande existe, notamment dans les PME, mais à la différence des grands groupes, elles sont moins bien armées pour les former.»
«Paradoxalement, l'impact de cette loi sur la politique de gestion des ressources humaines a fléchi, relève Charlotte Le Gaillard. Ainsi, 57 % des personnes interrogées considèrent qu'elle a un impact «modéré» ou «fort», contre 65 % il y a six mois. » Pourtant, deux entreprises sur trois estiment que cette loi incite à embaucher des personnes handicapées et près de trois sur quatre considèrent que leur recrutement et leur maintien dans l'emploi est «plutôt» ou «tout à fait» un objectif.
«En 2009, au plus fort de la crise, les sociétés ont fait de gros efforts pour maintenir en poste les personnes handicapées qui ont été moins touchées que les autres salariés par les plans de restructuration et les licenciements, souligne Annick Monfort, directrice des études à l'Agefiph. Résultat : si le nombre de handicapés chômeurs est passé en un an de 228 000 à 250 000, il a progressé deux fois moins vite que le chômage dans son ensemble.»
L'emploi est avec la formation au cœur des accords d'entreprise sur le handicap. S'ils sont encore rares - seulement 7 % des sociétés, selon le ministère du Travail, en ont signé et il s'agit le plus souvent de grands groupes (Crédit agricole, Axa France, Lyonnaise des eaux, EDF…) - le nombre d'établissements ayant conclu un accord a tout de même augmenté de 30 % depuis 2005.
«Nous souhaitons une montée en puissance d'accords ambitieux et de qualité car ils constituent un très bon outil pour mettre en place, sur plusieurs années, une véritable politique d'emploi des travailleurs handicapés favorisant le recrutement et la formation», déclare Jean-François Hatte, chef de la mission pour l'emploi des personnes handicapées à Bercy.
Une ombre à ce tableau d'ensemble plutôt positif : seulement une entreprise sur quatre envisage d'embaucher des salariés handicapés d'ici à la fin de 2010. C'est cinq points de moins que dans le précédent baromètre.
(1) Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées. (2) Une entreprise sur deux a payé la contribution Agefiph en 2009.