La discrimination dans tous ses états – État sur les discriminations
La lutte contre les discriminations – notamment syndicale – connaît, depuis quelques années maintenant et suite à l’engagement de la CGT, de ses militants et des avocats progressistes, un foisonnement jurisprudentiel important qui permet, dans nombre d’entreprises, de voir cesser, à terme, des distorsions de carrières professionnelles fondées sur la seule appartenance à une centrale ouvrière. Les nombreuses victoires remportées en ce domaine ont pour fondement juridique principal deux textes du Code du travail, qui sont, d’une part, l’article L. 2141-5, qui interdit « à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment (…) d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages ». Ces avancées permettent aussi, d’autre part, de faire évoluer les règles d’égalité devant les conditions de travail de manière plus générale, ainsi, l’article L. 1132-1 du Code du travail interdit « toute mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation ou encore de qualification, en raison de son orientation sexuelle, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de ses convictions religieuses, etc. ».
Cet inventaire à la Prévert est, en soi, démonstratif de l’esprit – et si l’on peut dire de la philosophie – du législateur et de l’objectif de protection recherché par ce dernier lors de l’adoption de ce texte. En effet, comme le lecteur pourra le remarquer à l’énoncé de cet article, le salarié est protégé de toute intrusion et prise en compte par un employeur de quantité d’éléments qui relèvent de l’essence de son être (caractéristiques, appartenances, orientations) ou encore de sa vie privée (opinions ou convictions). Par opposition, l’expression – ou l’exercice – de ces éléments préservés ne saurait, en aucun cas, se déployer et prendre place dans l’entreprise (militantisme politique ou sexuel, prosélytisme ou simple exercice de rites religieux, revendications ethniques ou culturelles…)
En d’autres mots, la loi sur la discrimination est de l’essence de la nation française, laïque. Elle interdit que l’on juge et prenne en considération ce que chacun pense ou vénère dans sa sphère intime et dans sa vie privée, dès lors que cela n’entrave pas l’exercice de ses fonctions ou de son travail.
À l’inverse, seul est protégé l’exercice de l’activité syndicale montrant, de ce fait, tout le particularisme du militant syndical : être syndicaliste c’est, en soi, être militant, c’est encore permettre au mandaté ou à l’élu d’exercer dans l’entreprise toute la plénitude de son engagement et de le faire savoir auprès des autres, c’est autoriser les syndicats à être force de proposition dans l’intérêt de la société et des travailleurs salariés qui, tous les jours, viennent dans l’entreprise exercer leurs talents.
Auteur : Jérôme Barzakian - avocat à la cour