L'employeur à qui le salarié reproche un licenciement irrégulier en raison de sa participation à une grève doit justifier sa décision

Publié le par Eligi Formation

Dans le cadre juridique de la lutte contre les discriminations, souvent les auteurs d'actes discriminatoires n'ont pas conscience que leurs décisions doivent pouvoir se justifier objectivement. En effet, dans la procédure civile, il appartient à la personne, physique ou morale, de prouver l'objectivité de sa décision. Cette règle juridique s'appelle l'aménagement de la charge de la preuve. Instaurée par la loi du 11 Novembre 2001 portant sur la lutte contre les discriminations dans l'emploi, cette procédure a pour but de lutter plus efficacement contre les discriminations. Jusqu'alors, il appartenait toujours au salarié ou au candidat d'apporter les preuves de cette discrimination. Aujourd'hui, seuls de faisceaux de présomption de l'acte discriminatoire peuvent suffire à un juge pour demander à la personne mise en cause de justifier l'objectivité de sa décision.

 

En conséquence, cette procédure s'applique à toute décision, tel que l'entrée en formation, la vente d'un bien, l'accès à l'éducation (ex: looi 2005 sur l'intégration en milieu normal des enfants handicapés)...

 

C'est ce que rappelle un arrêt de la Cour de cassation en date du 9 Janvier 2011. Dans cette affaire, un salarié dénonce son licenciement en raison de sa participation à un mouvement de grève dans l'entreprise :

 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., mis à disposition de la société Logiss à compter du 15 février 2002 dans le cadre de contrats de travail temporaire, puis engagé par cette société par contrats à durée déterminée, dont le dernier venait à échéance le 15 mai 2003, a saisi le conseil de prud'hommes pour demander la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, pour qu'il soit jugé que son licenciement intervenu alors qu'il participait à un mouvement de grève est nul, obtenir sa réintégration et le paiement de diverses sommes ;


Sur le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;


Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu les articles L2511-1, L1132-1 et L1134-1 du Code du travail ;

Attendu que lorsqu'un salarié allègue que la rupture du contrat de travail est intervenue en raison de sa participation à un mouvement de grève, il appartient à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à l'exercice normal du droit de grève ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'il résulte des attestations produites par celui-ci qu'une partie du personnel de la société se trouvait en grève depuis le 12 mai 2003 et que lui-même figurait au nombre des grévistes jusqu'à la rupture de son contrat de travail, mais qu'il ressort de l'ensemble des explications des parties que cette rupture n'avait aucun lien avec le mouvement de grève auquel il a participé, mais résultait uniquement de la survenance du terme du contrat de travail prétendument conclu pour une durée déterminée, alors que les parties se trouvaient, par l'effet de la requalification, liées par un contrat de travail à durée indéterminée depuis le 15 février 2002, que le licenciement de M. X... n'était donc pas nul, mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la relation de travail avait été irrégulièrement rompue au cours d'un mouvement de grève auquel le salarié participait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


Par ces motifs :
Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande au titre de la nullité de son licenciement, et a condamné la société au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité de préavis, l'arrêt rendu le 29 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.

Publié dans Condamnations

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