Discrimination homophobe = 615 000 euros
Monsieur X… a été engagé par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris Ile-de-France (la Caisse) à compter du 1er février 1976.
Il a passé avec succès les épreuves d’aptitude aux fonctions de sous-directeur organisées dans le groupe.
Ayant été licencié pour faute grave le 27 juin 2005, il a conclu une transaction le 7 juillet 2005.
Il a saisi ultérieurement la juridiction prud’homale afin d’obtenir réparation d’une discrimination pratiquée à son encontre en raison de son orientation sexuelle du fait de sa non-accession à des fonctions de sous-directeur.
D’une part, la Caisse a fait grief à la Cour d’appel de Paris de dire que la discrimination n’avait pas été l’objet de la transaction.
La Cour de cassation a considéré qu’ayant relevé qu’en dépit de l’insertion d’une formule très générale, la transaction ne faisait état que d’un litige portant sur la rupture du contrat de travail, la Cour d’appel de Paris a estimé que la discrimination alléguée par le salarié n’était pas incluse dans cette transaction.
D’autre part, la Caisse a fait grief à la Cour d’appel de Paris de l’avoir condamné à payer à Monsieur X… les sommes de 35.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi et de 580.000 Euros au titre du préjudice financier découlant de l’entrave au déroulement de sa carrière et de perte de ses droits à retraite consécutifs à la discrimination subie.
La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel de Paris a relevé que, postérieurement à son inscription sur la liste d’aptitude de sous-directeur, Monsieur X… avait postulé en vain à quatorze reprises à un poste de sous-directeur ou à un poste de niveau équivalent, qu’il a répondu à des propositions de postes à l’international, à une proposition de poste dans une filiale à Paris, qu’il est le seul de sa promotion de 1989 à ne pas avoir eu de poste bien que son inscription sur la liste d’aptitude ait été prorogée à deux reprises en 1995 et en 2000 et qu’il était parmi les candidats les plus diplômés et que plusieurs témoins font état d’une ambiance homophobe dans les années 70 à 90 au sein de l’entreprise ; qu’elle a pu en déduire que ces éléments laissaient présumer l’existence d’une discrimination en raison de son orientation sexuelle.
Ensuite, qu’ayant relevé que la Caisse ne pouvait soutenir utilement, d’une part, qu’elle n’avait pas disposé de poste de direction en son sein propre entre 1989 et 2005, d’autre part, qu’elle n’avait pas été en mesure de recommander activement la candidature de son salarié sur des postes à l’international, la Cour d’appel de Paris a pu décider que les justifications avancées par l’employeur ne permettaient pas d’écarter l’existence d’une discrimination en raison de l’orientation sexuelle du salarié.
Cass. soc. 24 avril 2013 n° 11-15204
Source : Eric Rocheblave, avocat